Colère des agriculteurs La FNSEA annonce des actions toute la semaine et aussi longtemps que nécessaire
Arnaud Rousseau, président du premier syndicat agricole français, la FNSEA, a annoncé lundi sur France Inter le lancement dans toute la France d'actions d'agriculteurs appellant le gouvernement à entendre leur « ras-le-bol » et leur « colère », avant une réunion avec le Premier ministre. (article mis à jour à 14h)
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« Je peux vous dire que dès aujourd'hui et toute la semaine et aussi longtemps qu'il sera nécessaire, un certain nombre d'actions vont être menées », a déclaré le patron de la FNSEA, Arnaud Rousseau, sur France Inter, alors que plusieurs blocages ont déjà lieu en Occitanie. Ces actions concerneront « chaque département », a-t-il dit, soulignant que « la montée de la tension est forte, d'où la nécessité d'apporter des réponses concrètes ».
Le Premier ministre, confronté à sa première crise depuis sa nomination le 11 janvier, recevra Arnaud Rousseau et son homologue des Jeunes agriculteurs (JA) Arnaud Gaillot à 18h. Les autres organisations agricoles (Coordination rurale, Confédération paysanne) demandent aussi à être reçues. Si le gouvernement n'est « pas au rendez-vous », « on peut être à l'aube d'un gros mouvement agricole », a déclaré lundi matin le président des JA, sur France 2.
Depuis jeudi soir, plusieurs dizaines d'exploitants bloquent l'autoroute A64, qui relie Toulouse à Bayonne, à hauteur de Carbonne, en Haute-Garonne. Lundi juste avant midi, plusieurs dizaines de manifestants ont occupé les voies de l'autoroute A9 dans le sens Montpellier-Barcelone au niveau du péage Perpignan-sud, perturbant le trafic routier sur cet axe. Des agriculteurs bloquaient aussi lundi les accès à la centrale nucléaire de Golfech, dans le Tarn-et-Garonne.
Des manifestations provoquées par des charges financières et des normes environnementales jugées trop lourdes, motifs de mécontentement récurrents dans la profession que le gouvernement tente de ménager depuis des années pour éviter d'ouvrir un nouveau front social.
En décembre, l'ex-Première ministre Elisabeth Borne avait annoncé à la FNSEA et aux JA l'abandon de hausses de taxes sur les pesticides et l'irrigation, suscitant l'irritation des organisations environnementales et d'acteurs de l'eau.
Depuis la Vendée, le ministre de l'agriculture Marc Fesneau a communiqué lundi sur le lancement, déjà dans les tuyaux, d'un « fonds hydraulique » pour aider les agriculteurs à investir dans le stockage de l'eau, la réutilisation des eaux usées ou l'efficience de l'irrigation. Il doit être abondé de 20 millions d'euros « dès 2024 », selon son cabinet. Dans ce territoire comptant depuis des années des réserves d'irrigation, qualifiées de « bassines » par leurs détracteurs, il a aussi réaffirmé que le gouvernement allait s'employer à réduire les délais des procédures pour accélérer la construction de telles installations.
Le gouvernement craint un embrasement car, des Pays-Bas à la Roumanie en passant par la Pologne ou l'Allemagne, les agriculteurs multiplient les actions contre les hausses des taxes et le Green Deal européen. Le tout, sur fond d'inflation et de concurrence des importations ukrainiennes.
Le Royaume-Uni n'est pas épargné : des producteurs de fruits et légumes vont manifester lundi devant le Parlement à Londres pour protester contre les contrats d'achats « injustes » qui les lient à la grande distribution.
« Simplification »
En France, la profession est aussi échaudée par les reports successifs du projet de loi sur l'agriculture, promis il y a plus d'un an par Emmanuel Macron et finalement moins ambitieux que la « loi d'orientation agricole » initialement annoncée.
Dimanche, le ministre de l'agriculture Marc Fesneau a annoncé un nouveau délai. Le texte, qui devait être présenté mercredi en Conseil des ministres, ne le sera que dans « quelques semaines » avec pour objectif d'être débattu au Parlement « au premier semestre 2024 ».
Le projet de loi que doit présenter le gouvernement entend favoriser le renouvellement des générations en agriculture, une nécessité à l'heure où la population des près de 500 000 chefs d'exploitation vieillit.
Il sera complété pour permettre une « simplification » du mille-feuille de réglementations imposées à la profession, a promis dimanche M. Fesneau. « Une simplification drastique des normes » est nécessaire, a abondé le ministre de l'Économie Bruno Le Maire sur TF1. « Le plus tôt sera le mieux. (...) Nous, on a très envie de parler de compétitivité », a dit M. Rousseau lundi matin.
A moins de cinq mois des élections européennes, les oppositions courtisent le monde agricole.
Le porte-parole du Rassemblement national (RN), Sébastien Chenu, a estimé lundi sur TF1 que le gouvernement accusait un « retard à l'allumage » face à des doléances anciennes.
Droite comme gauche ont demandé à l'exécutif de renoncer à alourdir le coût du carburant des tracteurs.
Le ministère de l'Economie et la FNSEA se sont mis d'accord l'été dernier sur une réduction progressive de la niche fiscale sur le gazole non routier (GNR), en échange de compensations. Arnaud Rousseau avait précédemment défendu une « trajectoire supportable », négociée par le syndicat « en responsabilité ».
Mais la Coordination rurale, 2e syndicat agricole, continue de s'opposer catégoriquement à la remise en cause de cette niche fiscale, tout comme le chef des députés Les Républicains, Olivier Marleix.
Interrogé par l'AFP, François Veillerette, porte-parole de l'ONG Générations futures, comprend les revendications pour un meilleur revenu et interdire d'importer des produits venant de pays moins-disants. Mais « là où ça ne va pas du tout, c'est sur les attaques qu'ils continuent à faire sur tout ce qui est normes environnementales ». « On a l'impression qu'ils n'en ont jamais assez », veulent « toujours plus de pesticides, toujours moins de contrôle, toujours moins d'évaluation du risque » lié à ces molécules, a-t-il déploré.
Du côté de Bruxelles, une réunion des ministres de l'agriculture est prévue mardi.
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